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Éditorial N° 249

Ah ! Racine...
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Nous ne résistons pas au plaisir d’offrir à nos lecteurs un nouvel
extrait (voir DLF, n° 247) de Vous avez dit « classique » ?*, ouvrage
dans lequel notre président fait redécouvrir la beauté de la langue
de Racine.
J’aime le théâtre et plus que tout, j’aime cette forme particulière de
théâtre qu’on appelle la tragédie française classique. Shakespeare,
Claudel, Molière, Goldoni m’éblouissent, me bouleversent,
m’enchantent ; mais une seule scène de Racine, une tirade, un vers,
et c’est quelque chose de plus secret, de plus intime, qui est
touché.
Peut-être cela ne concerne-t-il que moi seul, s’il s’agit seulement de
mon goût : dans ce cas, ce livre n’a pas d’objet. Mais je ne le crois pas.
Ce qui en moi est atteint chaque fois que Racine ouvre la bouche, c’est
ce par quoi je participe, en tant qu’homme parlant français, à une
culture fondée sur une langue ; et qui tout à coup ressent en écoutant
les vers de Racine ce qu’un musicien nous fait percevoir à l’instant où,
en accordant son violon, il arrive progressivement à la
quinte juste ;
tout à coup, il y a une seconde où disparaissent les sons parasites et
les battements, et où, pour une infime tension supplémentaire de la
corde, la pureté absolue est soudain atteinte, rendue perceptible ; et
à cette seconde les harmoniques aussitôt s’envolent.
Philippe Beaussant
de l’Académie française
* Vous avez dit « classique » ? Sur la mise en scène de la tragédie (Actes Sud, 1991, p. 15
et 16).
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