Défense de la langue française   
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Joachim du Bellay


« Amplifier la langue française »

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme celui-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !


Les festivités marquant les 500 ans de Joachim du Bellay ont été lancées en mars dernier à Liré, son village natal. De nombreuses manifestations ont eu lieu tout au long de l’année pour célébrer la mémoire du poète angevin, signataire à vingt-sept ans du manifeste collectif Défense et illustration de la langue française.

Du Bellay, issu d'une vieille famille de la noblesse d’Anjou, naît en 1522 au château de la Turmelière, paroisse de Liré, non loin d'Angers. À vingt ans il entame des études de droit à Poitiers. Il rencontre Jacques Peletier du Mans et Pierre de Ronsard. Ensemble, ils partent pour Paris en 1547 suivre les cours de Jean Dinemandi, surnommé Dorat au collège Coqueret. Dorat les initie à l'humanisme et aux humanités grecques et latines.

Le latin est encore la langue littéraire dominante en Europe. En dehors de quelques chansons et romans populaires, l'essentiel de la poésie, de la littérature, de la science et du savoir se fait dans cette langue. Cependant elle n'est accessible qu'à une élite. Le peuple parle les patois et dialectes locaux. Le français, jugé vulgaire, n’est utilisé qu’en Ile-de-France. Certes, depuis l'Ordonnance de Villers-Cotterêts promulguée par François 1er en 1539, il a remplacé le latin dans les cours de justice. Mais il n'est pas encore possible d’envisager que le français, aux règles encore mal définies, puisse supplanter le latin dans les productions de l'esprit.

C’est pourtant l’ambition de du Bellay et de ses amis poètes. Réunis au sein d’un groupe nommé la Brigade – qui deviendra plus tard la Pléiade - ils souhaitent faire du français une langue aussi noble que le grec et le latin, à l'imitation du toscan qui a entamé ce processus au XIVe siècle avec Dante, Pétrarque et Boccace.

C’est ainsi que du Bellay rédige en 1549 La Défense et Illustration de la langue française. Dans ce manifeste, il défend l’idée que la langue française peut rivaliser avec le latin, et même le supplanter. Selon lui, la langue française n’a pas encore atteint sa maturité et il convient de la développer en encourageant sa pratique et en l'enrichissant de toutes les manières : création de néologismes et de mots nouveaux issus de dialectes, de langues étrangères ou réhabilités. Ainsi elle deviendra une langue de référence et d’enseignement. Le manifeste prône également la création de nouveaux genres poétiques et d’une nouvelle poésie, inspirée par l’Antiquité plutôt que par le Moyen-Âge. Certaines de ces idées ont été exprimées l'année précédente par Thomas Sébillet dans son Art poétique. Du Bellay les développe dans un style lyrique et insolent – polémique dirait-on aujourd’hui.

Le manifeste fait débat. Sébillet et Barthélémy Aneau se montrent très critiques, lui reprochant notamment de « rapetacer » Horace. Du Bellay répond à ces attaques , notamment dans la Musagnaeomachie (« Combat des muses contre l’ignorance »). Dans les années qui suivent, d’autres hommes de lettres appuient la démarche de du Bellay. Ainsi Peletier du Mans, autre membre de la Pléiade, dans Dialogue de l'orthografe (1550), le poète Jacques Tahureau dans son Oraison au Roi de la grandeur de son règne et de l'excellence de la langue française (1555), Ronsard dans son Art poétique (1565) ou le philologue Henri Estienne dans Précellence du langage français (1579).

En 1553, Du Bellay accompagne le cardinal Jean du Bellay, cousin de son père, à la cour pontificale de Rome en tant que secrétaire et intendant. Il s'y ennuie et exprimera sa déception et la nostalgie de son Anjou natal dans Les Regrets. Malade, souffrant de surdité, il regagne la France où il doit se débattre dans des difficultés matérielles. Du Bellay meurt des suites d'une apoplexie le 1er janvier 1560, à l'âge de 37 ans.

La Défense et Illustration de la langue française est aujourd’hui considérée comme une œuvre magistrale de l'histoire de notre pays. Exprimant une forme de patriotisme visant à l’unification de la France par le biais de la langue française, elle synthétise sur le plan culturel ce que l’Ordonnance faisait appliquer dans l'administration.

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DÉFENSE DE LA LANGUE FRANÇAISE
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