Défense de la langue française   
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Tics et incorrections
Que ce soit dans son entourage, chez les commerçants ou dans les médias, qui n’a pas entendu depuis quelques années la formule aussi saugrenue qu’incorrecte « On est sur... », en début de phrase ?

Expression forcément malheureuse puisqu’il conviendrait en l’occurrence de dire, selon les cas : « C’est / Ce sont », « Voici », « Il s’agit de » (formule ayant désormais quasiment disparu), « On est face à », « Nous avons affaire à », « Nous sommes en présence de », etc. Autrement dit, tous mots ou expressions servant à présenter ou à introduire quelque chose et qui font la richesse de la langue française.

Ainsi, s’agissant de présenter une volaille, un vin, un athlète ou une maison, nombreux sont désormais ceux qui, invariablement, ne disent plus que : « On est sur un poulet fermier » (comme s’ils le chevauchaient), « On est sur un bordeaux rouge » (comme s’ils avaient les pieds sur le tonneau), « On est sur un sportif de haut niveau » (comme s’ils étaient juchés sur ses épaules), ou « On est sur une belle villa » (comme s’ils étaient sur son toit).

De pareilles absurdités pourraient prêter à sourire s’il s’agissait de fautes commises par des gens peu instruits ou des étrangers connaissant mal notre langue. Mais en l’occurrence, ces inepties ne sont pas spécialement le fait d’incultes puisqu’on ne compte plus les cadres, les chefs d’entreprise, les journalistes, les parlementaires, les ministres, et même les généraux, qui les profèrent !

Il est à noter que ce « On est sur » n’est pas utilisé seulement pour désigner des choses concrètes, palpables, comme celles énoncées cidessus, mais l’est également pour désigner de pures abstractions comme, par exemple, un régime politique, une crise économique, un conflit social, etc. « On est sur » semble constituer une formule magique pouvant remplacer toutes celles précitées. Chacun aura perçu l’appauvrissement linguistique qui en résulte.

Cette formule fourre-tout n’a même pas l’intérêt d’être forcément plus brève, car en quoi « On est sur un gigot d’agneau » serait-il plus court que « C’est un gigot d’agneau » ? En effet, cette expression ne fait souvent que rallonger la phrase sans en améliorer la compréhension. Quel intérêt y a-t-il à dire : « On est sur une inflation de 5 % », alors qu’il suffit de déclarer « L’inflation est de 5 % » ? En quoi est-il préférable de dire : « On est sur une pluie glaciale », plutôt que « La pluie est glaciale » ?

Comme vous l’aurez compris, il s’agit d’un tic de langage prétentieux et absurde, tant il est évident qu’en l’occurrence on est bien davantage sous la pluie que sur la pluie !
Laurent Bouvet


Rappel

De fâcheuses habitudes sont récemment apparues en matière de présentation des quantités monétaires. D’une part on indique les décimales par un point et non une virgule. D’autre part on met le symbole des montants devant les chiffres. Ainsi, au lieu d’écrire 1 530,50 €, on écrit « € 1 530.50 ». Cette manière d’écrire les nombres, si elle n’est pas généralisée, montre cependant une forme de soumission aux normes anglo-saxonnes.

Rappelons qu’en France la norme Afnor NF X 02-003 de juin 2012, qui précise les principes de l’écriture des nombres, grandeurs, unités et symboles, confirme le choix de la virgule. D’autre part, le code de rédaction institutionnel de l’Union européenne prévoit que les références monétaires se placent après le nombre, dont elles sont séparées par une espace. La seule exception concerne l’anglais (Irlande et Malte).
Jean Hervé de Lestreez
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