Défense de la langue française   
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DLF, n° 229

CE MONDE-LÀ. Dictionnaire personnel de l’époque, de François Taillandier
Flammarion, 2008, 178 p., 18 €
En lisant avec un rare plaisir de l’esprit, avec ces envies de rire qui suggèrent qu’il vaudrait mieux en pleurer, en lisant donc Ce Monde-là que vient de publier François Taillandier, je pensais à Mme de Sévigné, qui trouvait que le monde marchait « cul par-dessus tête », et à Jacques Bainville, qui estimait que « tout avait toujours très mal marché ». Que diraient-ils aujourd’hui devant les cabrioles, les contorsions et les inconséquences de notre temps ?
De billets publiés dans la presse, où il a exercé avec une sagacité rare et une causticité souriante ou détachée ses dons d’observateur critique, notre auteur a tiré son « dictionnaire personnel de l’époque », classant ses remarques par ordre alphabétique. Il annonce lui-même le sujet de son livre : il montre « comment les mots que nous entendons ou que nous employons, comment les récits (car nous sommes racontés), comment les images (car nous sommes représentés) modifient insensiblement notre perception du monde, notre idée de nous-mêmes ». Ce dictionnaire – ce qui n’a rien d’étonnant – étudie les mots qui traduisent aujourd’hui par action ou par omission les défauts de la vie en société, nos mensonges et nos vanités. Et de noter : « C’est au moment où l’Europe se lançait hardiment dans sa propre édification [...] qu’elle a jeté par-dessus bord la seule langue qu’elle avait en commun depuis toujours : le latin. L’Église catholique a donné le branle. » Si l’on est attentif à l'évolution du langage, on fait de belles découvertes : celles de l’exosquelette, de la langue d’inox, du proximisme, par exemple.
Soyez-en persuadés : vous devez « oser l'excellence », « gérer votre gourmandise sans prise de tête ». Enfin, si vous tenez à garder votre personnalité, adoptez avec le sourire, avec humour, cette arme efficace de défense, ce que nous nous permettrons de nommer « la Taillandier attitude ». Jacques Dhaussy

LE SENS CHRÉTIEN DES MOTS. Noms propres et communs du catholicisme,
de Pascal-Raphaël Ambrogi
Tempora, 2008, 336 p., 18,90 €
Quand on entend un radiophoniste parler de « transubstantation » sur une chaîne nationale citant l’article d’un grand quotidien, mais le responsable du prompteur avait dû mal copier – c'était le 11 août dernier –, quand on entend mélanger ascension (terme actif) et assomption (terme passif), on se dit que Le Sens chrétien des mots arrive à point. Cet ouvrage rendra de grands services aux journalistes, mais aussi à tous les jeunes ignorants du catéchisme élémentaire et à toutes les personnes qui s’intéressent à l’histoire de l’art. Qu’est-ce qu’un exèdre ? Une prédelle ? Quelle est la différence entre une dalmatique et une chasuble ? Un rochet et un surplis ? Tout cela est expliqué dans cet ouvrage. Et pour décrire un tableau, en comprendre le sujet et le sens, il suffit de l’ouvrir à la bonne page. Comme le note le cardinal Paul Poupard dans la préface : « ... le message de la Révélation chrétienne se présente toujours revêtu d’une enveloppe culturelle dont il est indissociable. »
Ce dictionnaire est beaucoup plus qu'un dictionnaire, car il offre une foule de références, il multiplie les citations de la Bible, de la liturgie et de nombreux auteurs. Ouvrage pratique avant tout, il ne prétend pas être exhaustif, mais il indique de nombreuses pistes dans les domaines aussi bien du culte proprement dit que de l’architecture, de l’organisation sociale et politique, de la hiérarchie, des fêtes, du droit, de la morale, des évènements historiques, etc. L’auteur s’était déjà fait connaître par ses Particularités et finesses de la langue française (éd. Chiflet). Il offre aujourd'hui un instrument de travail pratique, commode à consulter, un véritable guide pour éviter les à-peu-près, les confusions possibles. Grâce à ces pages précieuses, le cap est immédiatement mis sur le « mot juste ».
Une douzaine d’annexes complètent ce volume : on y trouve notamment la liste des papes et des antipapes, quelques textes pontificaux, notamment la déclaration Nostra Aetate sur l’Église et les religions non chrétiennes et le motu proprio Summorum Pontificum du 7 juillet 2007, ainsi qu’un florilège de phrases d'auteurs parfois inattendus et une bibliographie. Jacques Dhaussy

NOUVELLES RECHERCHES EN ORTHOGRAPHE, de Catherine Brissaud, Jean-Pierre Jaffré, Jean-Christophe Pellat
Lambert-Lucas, 2008, 220 p., 25 €
Un souffle d'air frais et revivifiant : c’est ce que l’on ressent à la lecture de cet ouvrage.
Il rend compte des journées d’études de Strasbourg de juin 2007 au cours desquelles l’orthographe fut abordée sous l’angle de la linguistique, de la psycholinguistique et de l’acquisition.
Le thème central est celui de la double face de l’orthographe, expression à la fois de l’oral et du sens dans les deux domaines complémentaires que sont la phonographie et la sémiographie. C’est dans ce cadre qu’est examiné le fonctionnement fondamental de l’orthographe du français, du turc et du japonais; il est justement souligné que l’histoire de la langue française explique la présence des nombreuses irrégularités de son orthographe, ce qui est tout aussi vrai pour les écarts entre la structure formelle et la structure sémantique des mots, source de bien des incohérences orthographiques. La variation graphique est abordée à travers les écrits électroniques. Des expérimentations rigoureuses offrent de nouvelles avancées dans la compréhension des processus d’acquisition des marques grammaticales. Enfin, des propositions didactiques sont présentées ainsi que des réactions d’enseignants face à la norme et aux réformes. Cet ouvrage constitue un nouveau témoignage de l’intérêt actuel pour l’orthographe, qui se dégage ainsi de l’immobilisme dans lequel elle a été corsetée depuis la fin du XIXe siècle et retrouve enfin la vitalité qui fut la sienne dans les siècles passés. Claude Gruaz

LES DISPARUS DU LITTRÉ, d’Héloïse Neefs, préface d'Alain Rey
Fayard, 2008, 1 318 p., 45 €
Cet ouvrage est né d’un certain « agacement » de l’auteure devant l’intérêt porté, à l’occasion des rééditions de dictionnaires, exclusivement aux mots entrants au détriment des mots évincés. Aussi a-t-elle analysé méticuleusement un dictionnaire de référence, celui d’Émile Littré (Hachette, 1863-1873), pour en recenser les mots qui ne figurent plus dans nos dictionnaires. Les quelque 25 000 « disparus » (chenette, damnement, laurière, plurioculaire, rétinoscope,ventousation...) ont, pour la plupart, appartenu à des domaines scientifiques ou techniques, et revêtent parfois une graphie qui les rend méconnaissables ou semblent incorrectement orthographiés. Certains ont été introduits comme néologismes par Littré. Mais ces mots n’ont pas pour autant disparu de la langue, comme l’attestent nombre de textes de la littérature. Alain Rey, dans une brillante préface intitulée « Les mots, des immortels ? » (p. 11 à 30), écrit : « Les mots sont tous menacés, mais tous capables de renaître. » Nous pouvons même gager que certains retrouveront un jour leur place dans un dictionnaire.
L’un des nombreux mérites de cet ouvrage qui, prend plaisir à le souligner Héloïse Neefs, « n’est pas un dictionnaire, même si cela y ressemble », est de démythifier « le » dictionnaire, en montrant très concrètement qu’il n’est pas une référence en soi mais « la sélection d’un certain nombre de mots et de faits linguistiques établie à un moment donné par une ou plusieurs personnes », alors qu’« on nous apprend dès l'enfance que le dictionnaire dicte la règle, la conduite, l’usage ». Une autre manière, très originale et riche, de relire un dictionnaire... Christine Jacquet-Pfau

LE DICTIONNAIRE DE LA MARINE, de Gérard Piouffre
Larousse, « In extenso », 2007, 476 p., 26 €
Même s’ils sont étrangers à l’univers de la marine, les amoureux des mots que sont nos lecteurs se laisseront charmer par l’étrangeté de termes rares ou inconnus qui donnent à l’ensemble de l’ouvrage un parfum de grand large. L’exotisme naît ici de la technicité.
Ce dictionnaire très complet, agrémenté de planches et de reproductions, offre des définitions précises de termes ignorés du profane, et de mots employés de façon approximative ou métaphorique dans le langage courant. Inversement, il permet de découvrir le sens métaphorique de termes que la marine a détournés de leur valeur première : les apôtres, par exemple, sont des pièces de bateau.
L’auteur fait aussi oeuvre d’historien, et rappelle à notre mémoire les hommes et les évènements dont le souvenir glorieux subit parfois l’érosion du temps.
Seule remarque négative : on peut déplorer que ce dictionnaire de qualité, susceptible d’intéresser un large public en dépit du caractère spécifique de son sujet, ne mentionne pas le genre des noms qui appartiennent au vocabulaire technique de la marine. Anne-Marie-Lathière

Signalons aussi :
  • LE CAHIER DE LETTRES ET LANGUE FRANÇAISE POUR LES NULS, de Jean-Joseph Julaud
    (Éditions First, 2008, 64 p., 6,90 €).
  • HISTOIRE DU VOCABULAIRE FRANÇAIS, d’Olivier Bertrand
    (Éditions du temps, 2008, 256 p., 18 €).
  • JEUX DE MAIN, JEUX DE VILAIN. L’histoire des expressions du sport et des Jeux olympiques, de Violaine Vanoyeke et Philippe Engerer (Bartillat, 2008, 210 p., 20 €).
  • LE GRAND LIVRE DES EXPRESSIONS. Connaître leur origine et savoir les utiliser, de Cosimo Campa (Studyrama perspectives, 2008, 224 p., 15 €).
  • LES ANAGRAMMES LITTÉRAIRES, d’Yves Lamy
    (Belin, « Le français retrouvé », 2008, 304 p., 15 €).
  • PETITE ANTHOLOGIE DES MOTS RARES ET CHARMANTS, de Daniel Lacotte
    (Albin Michel, 2007, 304 p., 12 €).
  • CACHE-CACHE ET CHAT PERCHÉ. Les mots du jeu, d’Anne Cauquetoux, illustrations de Jean- Pierre Lamérand (Le Robert, 2007, 80 p., 9,95 €).
Nos adhérents publient
  • De Jean-Joseph Julaud : Camarón relate l’épopée d’une compagnie de la Légion étrangère qui se dirige en avril 1863 vers ce village du Mexique, tandis que, dans les environs, règne une grande effervescence. Ce roman nous fait connaître le destin du peuple mexicain
    (Le Cherche-Midi, «Romansi», 2008, 240 p., 15 ).
  • L’Anthologie de la poésie amoureuse mèle des poèmes voluptueux, amusants, coquins... de Louise Labbé à Paul Éluard. En annexe, une « boîte à outils » expliquant les techniques d’écriture et une notice biographique des poètes cités (Éditions First, 2008, 160 p., 2,90 ).
  • Le Cahier de culture générale pour les nuls, à mettre entre toutes les mains (Éditions First, 2008, 64 p., 6,90 ).
  • Pour mieux dire « Peut mieux faire... », s’adresse à tous les professeurs qui cherchent à mettre de justes appréciations sur les bulletins scolaires (Éditions First, 2008, 128 p., 9,90 ).
  • Après les Acadiens du Canada et de la Louisiane, Alain Dubos nous présente, dans Rouges Rivières, le destin exceptionnel de Louis Riel, jeune métis francophone et père du Manitoba, qui, après un long exil, sera exécuté en 1885 (Timée éditions, 2008, 336 p., 21 ).
  • Aucun portrait contemporain de Guillaume le Conquérant ne subsiste, hormis la tapisserie de Bayeux, qui montre comment le duc de Normandie a pu devenir roi d’Angleterre après la bataille d’Hastings. Est-il destructeur ou instaurateur d’une civilisation ? L’angliciste Henri Suhamy nous donne son point de vue (Éditions Ellipses, 2008, 228 p., 28 ).
  • Pour ne plus faire rire les anglophones de nos traductions littérales, Jean-Bernard Piat a traduit en anglais nos expressions idiomatiques de tous les jours et les a regroupées en vingt thèmes : loisir, travail, amour, météo... It ’s raining cat s and dogs (Librio, 2008, 128 p., 3 ).
  • Dans le Bulletin de l’Académie nationale de médecine (T. 191), Pierre Delaveau et Jean-Roger Le Gall rappellent, d’alternatif à transmission, la définition de soixante-quatorze termes souvent utilisés par les médecins.
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